Incompréhension archéologique ! Le Grand Bestiaire va tenter de vous résumer les dessous d’un paradoxe sédimentaire. Le mystère est le suivant : comment se fait-il qu’à Glozel, petit village d’Auvergne, ait été retrouvé un ensemble d’objets datés de 17 000 av. J-C à 1300 apr. J-C, sur une zone de 1 200 m2 ?
Ce site qui reste aujourd’hui le casse-tête archéologique français, a été découvert le 1er mars 1924, par un humble cultivateur de l’Allier. Il laboure paisiblement son champ, la patte de son bœuf tombe dans un trou empli de céramiques étranges et d’un crâne humain.
Qu’a-t-il trouvé ? Dès cette question, la polémique est lancée. Car Glozel est pour bien des gens une tartufferie, un faux fabriqué de toutes pièces par Emile Fradin et sa famille. Cette découverte leur vaudra les pires ennuis. Procès, amendes, diffamations et perquisitions policières furent leur lot durant des années. Tout cela sans la moindre preuve qu’Emile Fradin ait un jour été un faussaire[1]. En 1925, il s’associe au Docteur Morlet, médecin féru d’archéologie. Ensemble, ils creusent le « Champ des Morts ». Ils tombent sur des céramiques originales, composées de têtes d’hommes et de femmes, de poteries à « tête de chouette », des tablettes d’argiles marquées d’une écriture alphabétiforme, des galets gravés, des armes en os, des urnes cinéraires[2] ainsi que des objets représentant des rennes[3]. Bien des pièces semblent préhistoriques.
Qu’il puisse exister une écriture sur des objets supposément âgés de 17 000 ans av. J.C. était, et l’est encore, inacceptable aux yeux de bien des scientifiques. L’histoire officielle fait en effet remonter l’apparition de l’écriture à l’époque des Sumériens (fin IVe millénaire av. J. C), en Mésopotamie. À cause de cette datation hypothétique, les professionnels ont crié au faux. Pour tenter de mettre un terme aux rumeurs, une datation à la thermoluminescence a été effectuée en 1972. L’opération a été réalisée par MM H. Mc Kerrell en Ecosse, H. François et G. Portal en France, ainsi que V. Mejdhal au Danemark. Les trois analyses donnent les mêmes conclusions : les objets les plus anciens datent bien du Paléolithique, les seconds du Néolithique, les troisièmes de l’Antiquité puis certains du Moyen-Age. Glozel est bel et bien authentique.
Toutefois, cela n’écarte pas les nombreuses questions : l’écriture découverte sur des objets vieux de – 17 000 date-t-elle réellement du Paléolithique, ou ont-elles été ajoutées par la suite ? La dernière hypothèse a été retenue par Hanz-Rudolf Hitz. En se servant des écritures gauloises (lépontique et cisalpin) comme base pour le déchiffrement, l’expert a ainsi pu établir que le glozélien était une langue celtique. Une écriture à consonance Gauloise, qui aurait pu être employé de 200 av. J. C à 100 apr. J-C. C’est sans doute le seul site à comporter du matériel archéologique allant de – 17 000 ans jusqu’au Moyen-Age. Treize analyses par Carbone 14 sur des os humains révèlent que ceux-ci ne sont âgés au plus tard que du mérovingien, au plus tôt du XVIIIe siècle. Par contre, des os d’animaux ont bel et bien donné les dates de – 17 000, et le matériel retrouvé (céramiques, armes ou mobiliers) est de facture néolithique. Comment peut-on trouver des objets du Moyen-Age comportant des symboles celtes censés les précéder d’au moins un millénaire ?
Les objets, au moment de leur découverte, n’ont pour la plupart pas été situés dans la couche stratigraphique. La stratigraphie indique la chronologie. En bref, plus l’archéologue creuse et descend profondément, plus il découvre des vestiges du passé. Or, il est difficile de mettre en exergue de quelle couche stratigraphique provient chaque pièce retrouvée. De plus, le Carbone 14 n’est pas infaillible. Il est possible de perturber chimiquement l’objet (incendies pour le défrichage en surface, transport du matériel à analyser, la perméabilité des couches perméables), ce qui fausse les résultats. Il est à noter que seulement 2% des 3 000 objets retrouvés ont été analysés.
Malgré les problématiques, qui restent persistantes sur le site de Glozel, deux affirmations sont résolument correctes:
- Glozel n’est pas un faux site archéologique fabriqué de toutes pièces afin d’attirer des hordes de touristes obèses, adepte de la coupe mulet et des chemises à fleurs ;
- Glozel n’est pas un point d’atterrissage pour extraterrestres de passage, eux aussi venus en touristes, mais sans cheveux et sans chemise
Glozel est un pan de l’histoire mais l’on n’est pas prêt d’avoir le fin mot de l’histoire. Les uns y voient une civilisation très ancienne potentiellement en contact avec des extraterrestres ou non, les autres y voient l’expérimentation d’un gosse faisant mumuse à fabriquer des faux. Chacun y va de son commentaire, certains postillonnent sans jamais avoir mis un pied sur le site. Bref, entre les divers camps, ça se bataille, ça hurle, ça s’insulte et se diffame. Pendant ce temps, le Champ des Morts demeure inviolé depuis la loi Carcopino de 1941. La solution serait de faire de nouvelles fouilles, mais gare à l’archéologue carriériste de tenter telle hérétique démarche, car sinon son chômage prématuré en serait l’inévitable conséquence.
très intéressant mais je reste sur ma « fin »; les fouilles sont arrêtées, les analyses aussi? peut-on aller plus loin dans cettte recherche,
question ?, d’où proviennent ces os vieux de 15 000 ans si bien conservés pour servir d’écritoire aux gaulois ?, … ainsi que certaines poteries à visage ressemblent à d’autres qui sont exposées au musée de Beyrouth … ma théorie étant celle d’un caravansérail sur les routes du sel et de l’étain !
Bonne question que vous posez ! Et la théorie des caravansérails est plausible. Glozel pose de nombreux problèmes cependant : pour schématiser, on ne sait toujours pas si les découvertes sont de vrais artefacts ou si ce sont des faux bien faits. Certains artefacts sont vrais mais les datations ne les attribuent pas au néolithique ni au paléolithique mais à l’antiquité, et certaines datations indiquent les époques médiévale ou moderne.
Merci de votre question, en tout cas. Ravi que le sujet vous ait intéressé !